Erasmus , la naissance d’un rêve

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Michele Corio

Michele Corio

Trente ans après la naissance d’Erasmus, voilà comment tout a commencé…

Pour la majorité de l’opinion publique européenne, le 15 juin 1987 représente un jour ordinaire. En réalité, il s’agit d’une date qui marque un succès, une histoire de partage, d’échange culturel et de croissance pour tous les étudiants européens et extra-européens. On célèbre, donc, la ratification du Concile Européen des Ministres qui a établi le programme Erasmus.

Tout au long de son histoire, le projet Erasmus poursuit une difficile et longue route se croisant avec les destins de personnes de valeur. A l’occasion de son anniversaire, j’aimerais bien décrire l’histoire de Sofia Corradi, de Domenico Lenarduzzi et de Franck Biancheri, trois intellectuels européens qui ont eu un rôle fondamental dans la création du programme Erasmus. Je tiens à préciser que je nourris une profonde reconnaissance et admiration pour ces personnes-là car ils ont travaillé et lutté ensemble pour un objectif commun, le plus grand jamais atteint pour le processus d’intégration européenne.

Sofia Corradi est née à Rome en 1934. Elle a fait des études en Droit auprès de Sapienza, Università di Roma. Puis, en 1957, elle participe à un programme d’échange auprès de la Columbia University à New York City. Au cours de son séjour aux Etats-Unis, elle obtient le diplôme du troisième cycle en législation universitaire comparée. A l’époque, les programmes d’échange étaient rares et difficiles : la chose la plus difficile à faire concernait la validation de tous les résultats obtenus. Une fois rentrée en Italie, Sofia Corradi a dû faire face à la bureaucratie italienne car son diplôme n’était pas bien accepté. C’est pourquoi elle a dû finir ses études à Rome.

Dès ce moment que l’idée du programme Erasmus fait son apparition.

Domenico Lenarduzzi est né à Turin en 1936. Après la guerre, il a déménagé en Belgique, précisément à Charleroi avec sa famille où son père travaillait dans les mines, comme de nombreux Italiens. Il obtient son diplôme auprès de l’Université Catholique de Louvain en 1959. Dans les années qui suivent, il s’engage dans les Institutions européennes : c’est juste le début d’une longue carrière, laquelle s’achève auprès de la Direction de l’Emploi, des Affaires Sociales et de l’Inclusion. Aujourd’hui, il est le Directeur Honoraire de la Commission Européenne.

Franck Biancheri est né à Nice en 1961. Au cours de ses études, il a fondé, en collaboration avec ses collègues, l’AEGEE[1] – Association des Etats Généraux des Etudiants de l’Europe. Cet acronyme rappelle la mer Egée et l’Antiquité grecque, berceau de la démocratie. En réalité, le nom vient de la Révolution Française et des Etats Généraux. Cette association d’étudiants, encore vivant, promeut l’unité européenne et l’intégration dans les domaines académiques. De plus, elle joue un rôle-clé dans la planification et la mise en place des programmes d’éducation et de formation communautaires. Après la chute du mur de Berlin, l’AEGEE est une des premières associations présentes dans l’Europe de l’est.

Corradi, Lenarduzzi et Biancheri sont trois personnes qui ont vécu en Belgique, en Italie et en France. Malgré la distance, leurs destins se sont croisés car ils partageaient une propension très marquée envers le Monde et l’Europe, tous unis par des idées qui ont fait et qui feront l’histoire.

En 1957 les Traités de Rome marqueront la naissance de la Communauté Européenne, où le sujet de l’instruction n’aura pas de place parmi toutes les interventions communautaires, tandis que la formation professionnelle exercera un rôle fondamental. On doit attendre le Traité de Maastricht, en 1992, pour que l’instruction ait une reconnaissance très méritée.

En 1959, Sofia Corradi mène des recherches sur le droit d’étude aux Nations Unis et ensuite, elle devient conseillère de la Conférence des Recteurs de toutes les Universités italiennes. Dans ce rôle, Madame Corradi commence à promouvoir ses idées prenant comme exemple les difficultés rencontrées pendant ses études, dans le but de donner aux jeunes des générations futures une mobilité plus simple, plus développée et pas chère. Son travail est long et demande un grand dévouement. C’est dans un climat marqué par l’instabilité, le changement et les manifestations d’étudiants qu’a lieu la conférence des recteurs, à Genève, en 1969. Alessandro Faedo, recteur de l’Università di Pisa s’adressant à toute l’assemblée, discute d’une note écrite par Sofia Corradi employant la célèbre machine à écrire dont le nom est Olivetti Lettera 22.

“Un étudiant peut demander le déroulement d’une partie de son plan d’étude auprès d’une Université étrangère, bien que sa famille ne réside pas à l’étranger, et après d’avoir eu le consensus du Conseil de Faculté […]”

Le thème de la coopération et de la coordination parmi les universités devient un des sujets les plus souvent abordés dans les débats concernant la programmation politique et stratégique produisant beaucoup de discussions dans le Parlement européen. Étape fondamentale sera le Joint Study Program[2] introduit par la Commission Européenne en 1976, les premiers programmes européens de coopération et de développement de cours de formation et d’instruction. Dès le début[3], les pays qui adhèrent à ces programmes sont la Belgique, le Danemark, la France, l’Italie, les Pays -Bas, le Luxembourg, l’Irlande et le Royaume-Uni ; puis la Grèce en 1980, l’Espagne et le Portugal en 1986. Le projet est ambitieux, mais les pays montrent encore quelque réticence à approfondir le discours en ajoutant des programmes d’échange institutionnels et ouverts pour tous les étudiants qui font partie des pays membres.

A l’époque, Lenarduzzi était employé de la Direction Générale de l’Emploi et des Affaires Sociales et, en même temps, il s’occupait de la formation et de l’instruction. Il épouse et promeut les idées de Sofia Corradi et d’autres intellectuels de son temps, soulignant aussi bien la nécessité de se battre pour un programme d’instruction supérieur européen complexe et synergique que prévoyant la nécessité de fonds européens comme outil de soutien pour les étudiants participants. La disponibilité insuffisante et la rigidité à agir parallèlement concernant certains pays membres ont été les obstacles principaux pour l’intégration et l’enrichissement du Joint Study Program, à cause de la présence d’accords entre les pays. En 1987, la médiation de Lenarduzzi et AEGEE gagne. Mitterrand, qui était le Président de la République Française dans ces années, décide de parler, par la suite, des programmes de formation universitaire au niveau communautaire. La demande fut bien acceptée par la Commission Européenne le 14 juin 1987.

Le programme Erasmus – European Region Action Scheme for the Mobility of University Students – naît le 15 juin 1987, prenant le nom du célèbre humaniste du XVI siècle Erasme de Rotterdam.

La confirmation est arrivée juste après une démarche très compliquée, où tous les Etats ont dû abandonner leur scepticisme et leurs positions nationalistes pour se projeter vers le futur en contribuant, en même temps, à une initiative européenne très fructueuse.  L’Erasmus fait naître un sentiment d’appartenance à quelque chose de plus grand qu’un pays. Il pousse au-delà des frontières pour avoir une vision complète de la réalité : connaître aussi bien de nouvelles personnes d’autres pays que des cultures et langues différentes et faire naître de nouvelles amitiés avec de personnes venues de pays différents. Tout cela donne aux étudiants l’opportunité de grandir et d’enrichir leur bagage d’expériences et de connaissances. Dès son entrée en vigueur, environ 3 millions d’étudiants ont participé au programme Erasmus. Cependant, au vu du climat d’euroscepticisme, du retour vers les nationalismes et la défense de frontières qui flotte depuis ces dernières années, l’Erasmus doit être aussi bien un point de repère solide, une lumière pour protéger les droits de toutes les citoyennes européennes que un pont vers le futur qui promeut l’intégration et le partage, dont  les  résultats  ne regardent pas au passé.

L’Erasmus est toujours une source d’inspiration pour tous ses participants : il y a beaucoup d’exemples d’étudiants qui ont fondé, après une expérience Erasmus, de nouveaux réseaux, des entreprises, des journaux ou des revues comme CaféBabel[4] : il s’agit de networks européens et internationaux qui ont pour but de faire interagir toutes les personnes du monde sans aucune distinction religieuse, culturelle, sociale ou raciale.

 Jeune Europe[5] s’insère dans cette période d’incertitude comme une idée nouvelle pour partager des opinions, sentiments, connaissances, théories, points de vue parmi des personnes de toute l’Europe. Jeune Europe essaye de donner une suite au parcours commencé par des grands intellectuels comme Altiero Spinelli[6] et Sofia Corradi.

Michele Corio

traduit par Alessandra Gigliotti

[1] https://www.aegee.org/

[2] https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/IP_87_78

[3] https://www2.crui.it/crui/inaugurazione_bruxelles/Joint%20Degrees.pdf

[4] https://cafebabel.com/en/

[5] https://jeuneurope.com/manifesto-it/

[6] https://en.wikipedia.org/wiki/Altiero_Spinelli

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